Blog Français de Droit Constitutionnel

Actualisation du corpus constitutionnel des droits fondamentaux

8 Janvier 2008 , Rédigé par Didier RIBES Publié dans #Droits fondamentaux

La chose est bien connue, la Constitution française se singularise, en matière de droits fondamentaux, par la coexistence de déclarations de droits d’époques différentes reconnaissant, de façon schématique, des types de droits différents : les grandes libertés dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; les droits économiques et sociaux dans le Préambule de la Constitution de 1946 ; les droits environnementaux dans la Charte constitutionnelle de l’environnement de 2004.

Se plaçant dans cette perspective historique de construction et dans une dynamique d’approfondissement de la protection des droits et libertés, le Président de la République a souhaité que soit modifié le Préambule de la Constitution de 1958 et que soient inscrits dans notre Loi fondamentale de nouveaux droits. « Il me semble que le moment est venu d'ajouter aux droits fondamentaux qui forment le socle de notre République les nouveaux droits que notre époque appelle », a-t-il déclaré lors de sa conférence de presse du 8 janvier 2008.

Nicolas Sarkozy a évoqué notamment l’égalité entre les hommes et les femmes, le respect de la diversité et ses moyens, la possibilité de véritables politiques d’intégration, les principes permettant de répondre aux défis de la bioéthique. Pour le chef de l’État, « il s'agit que sur les problèmes philosophiques, moraux, éthiques posés par la modernité, notre Constitution soit en avance sur notre temps, et non en retard ».
La rédaction d’un projet de texte sera confiée à une commission présidée par Mme Simone Veil. Ne pouvant se contenter d’introduire de nouvelles exceptions à des droits préexistants marqués par une signification forte et ancienne, au premier rang desquels se trouve le principe d’égalité, la mission sera indiscutablement difficile mais elle représente un moment très important pour le droit français des libertés fondamentales. 
 

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L
La modernisation annoncée de la Constitution sociale de la France est assurément heureuse: le constituant dérivé viendra ajuster le texte fondamental aux exigences contemporaines pour couronner l'oeuvre entreprise par le Conseil Constitutionnel, depuis la fameuse décision du 16 juillet 1971. Il est insolite que le comité Balladur n'ait pas formulé de suggestions en ce sens et qu'une commission Veil vienne revoir et corriger un rapport en état de mort clinique sur bien des points.Il faut aussi noter que l'actualisation à venir du corpus constitutionnel des droits fondamentaux comblera - en partie seulement - le retard accusé par la France en la matière. Songez qu'aujourd'hui la quasi-totalité des constitutions du monde, y compris les constitutions africaines (http://www.la-constitution-en-afrique.org/article-14993501.html) comportent un vrai catalogue de garanties reconnues à la personne et au citoyen. La réécriture du Préambule de la Constitution de 1958 - après l'adjonction de la Charte de l'environnement en 2005 - laissera subsister une exception française: la Constitution sociale n'a pas été écrite en 1958; elle est et demeurera très largement jurisprudentielle.Nicolas Sarkozy placerait-il le chantier constitutionnel sous le signe du changement dans la continuité?
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D
Permettez moi d'exprimer deux points de désaccord avec votre propos :- Tout d'abord, la lettre de mission adressée par le Président de la République au Comité présidé par M. Edouard Balladur ne comportait pas de demande claire dans le sens d'une actualisation de notre catalogue constitutionnel des droits fondamentaux. Seule la consécration constitutionnelle du principe de sécurité juridique était suggérée. Le Comité Balladur s'est précisément saisi de la question de la modification du Préambule de la Constitution de 1958.  Et ses conclusions sont exactement contraires à la proposition du Chef de l'Etat exprimée lors de la conférence de presse. Citons le rapport :"Le Comité a constaté qu'il n'était pas en mesure de trancher la question de l'éventuelle contrariété entre telle ou telle des dispositions des textes auxquels se réfère le Préambule. Sont en cause de délicates questions de principe, plus idéologiques que proprement juridiques. La même raison l'a conduit à ne pas souhaiter recommander aux pouvoirs publics d'ajouter au Préambule des principes nouveaux, même s'ils font l'objet d'un large assentiment au sein de la société. Ainsi en est-il de la diversité qui caractétise la composition de la société française, du principe de parité entre les femmes et les hommes, du principe de dignité de la personne humaine. Ces principes sont soit trop récents pour que leur contenu juridique soit figé dans un texte aussi solennel que le Préambule, soit déjà consacrés par une jurisprudence constante et désormais bien admise qu'il serait inutile sinon fâcheux de perturber".- Votre remarque sur le retard de la France et l'absence d'un "vrai" catalogue, si elle largement véhiculée, relève, à mon sens, de ces faux poncifs perpétués par une certaine pensée unique. Qu'on y regarde de plus près : les constitutions allemande ou italienne contiennent-elles substantiellement plus de droits que ce que l'on a appelé le bloc de constitutionnalité ? Le "niveau" de protection des droits fondamentaux en Allemagne, si souvent loué, n'est-il pas précisément davantage le fait de la jurisprudence constitutionnelle que du détail des dispositions constitutionnelles ? La Constitution française, avec ses diférents éléments d'époques différentes et de philosophies différentes, est-elle "inférieure" au Bill of rights américain ? Une déclaration des droits est comme la plus belle fille du monde... Les plus belles formules ne sont rien sans un juge qui en détermine les implications normatives et en assure la sanction. Et cela vaut pour toutes les constitutions du monde...